Catherine Simard, professeure en didactique des sciences et technologies, Université du Québec à Rimouski, Lucia Savard, enseignante du primaire et professionnelle de recherche, Université du Québec à Rimouski, Mélanie Cantin, coordonnatrice des communications, Technoscience Est-du-Québec et Dominique Savard, directrice générale, Technoscience Est-du-Québec
Alexis Legault, étudiant à la maitrise, Kara Edward, étudiante au doctorat et Adolfo Agundez Rodriguez, professeur, Université de Sherbrooke
Audrey Groleau, professeure de didactique des sciences et de la technologie, Université du Québec à Trois-Rivières, Irvings Julien, stagiaire postdoctoral, Université du Québec à Trois-Rivières et Marco Barroca-Paccard, professeur de didactique des sciences de la nature, de la biologie et de la durabilité, Haute école pédagogique de Vaud (Suisse)
Isabelle Arseneau, doctorante, Université Laval, Audrey Groleau, professeure, Université du Québec à Trois-Rivières et Chantal Pouliot, Professeure, Université Laval
Maia Morel, professeure agrégée, Université de Sherbrooke et Elizabeth Fafard, étudiante à la maitrise, Université de Sherbrooke
J’ai été surpris en apprenant que la Cour royale de justice britannique a approuvé l'extradition du fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, vers les États-Unis. Mais pas autant que de devoir expliquer à ma fille de 25 ans qui est Julian Assange. L’homme fait régulièrement les manchettes depuis 2010, non? Son histoire a été racontée dans de nombreux films et documentaires partout sur la planète. Alors pourquoi son nom, tout comme celui de Wikileaks, ne lui évoque-t-il absolument rien? Une fois le choc du paternel passé, notre conversation a rapidement tourné autour des sources médiatiques consultées par les jeunes de sa génération.
Ma fille ne fait que confirmer ce que j’ai lu dans les nombreuses études publiées dans les dernières années. La dernière en lice est celle de la Fondation canadienne pour l’innovation, en partenariat avec l’Acfas. Il s’agit de résultats d’un sondage afin de connaître les perceptions des jeunes Canadiennes et Canadiens de 18 à 24 ans sur quatre enjeux scientifiques : l’innocuité du vaccin contre la COVID-19, la durabilité de l’environnement, les changements climatiques et l’importance des STIM (science, technologie, ingénierie et mathématiques) pour l’avenir. Le rôle des médias sociaux et des influenceurs du Web y est particulièrement mis en lumière.
Sans surprise, les médias sociaux dominent largement avec plus de 75 % d’utilisation quotidienne. Loin derrière, les médias écrits (14 %), la télévision (11 %) et la radio (8 %) mordent la poussière. Et la tendance est loin de s’essouffler puisque cette année, TikTok a dépassé Google et toutes ses applications réunies pour le nombre de consultations. Il y a de quoi s'inquiéter quand on sait que l’information vérifiée, la mauvaise information et la désinformation s’y côtoient sans aucun contrôle. D’autant plus que 73 % des jeunes sondés ont affirmé suivre au moins un influenceur qui a exprimé des opinions antiscientifiques.
Et pourtant, 70 % de ces mêmes répondants ont indiqué faire confiance à la science pour se forger une opinion éclairée sur les quatre enjeux scientifiques du sondage. Ils reconnaissent que la science se base sur des faits vérifiables et qu’ils peuvent s’y fier pour fonder leur jugement. Cependant, le quart des sondés avoue se fier davantage à l’avis de son entourage ou à des influenceurs du Web.
Ce qui m’a surtout surpris de ma conversation avec ma fille, c’est combien nos jeunes sont complètement dépendants des médias sociaux pour s’informer. Comme s’ils vivaient sous une cloche de verre. Comme si un seul média pouvait remplir tous les besoins : savoir comment s’est déroulée la fête d’une amie et s’informer sur la protection offerte par les vaccins à ARN. Et même si la majorité des jeunes admet se baser sur la science pour prendre position sur des enjeux qui les concernent, force est d’admettre que les jeunes ne sont pas toujours en mesure de différencier le vrai du faux dans les médias. La solution passe, entre autres, par une meilleure éducation au numérique, au développement de l’esprit critique et par une meilleure culture scientifique. Cette dernière fait cruellement défaut dans les médias sociaux malgré quelques initiatives intéressantes. Spectre a publié dans la dernière année plusieurs articles sur le développement de l’esprit critique en classe et des ateliers sur le sujet sont toujours offerts sur le site. En attendant, papa va s'assurer que sa fille sort de sa cloche de verre de temps en temps. Avoir des enfants, c’est un contrat à vie!
P.-S. - L’étude porte également sur la perception des carrières scientifiques, et ce n'est pas plus encourageant. Consultez tous les résultats de l’étude en ligne.